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Human Rights Watch dénonce le nouveau projet de loi sur le blasphème en Mauritanie

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Tunis, Tunisie, 5  décembre (Infosplusgabon) - Les députés mauritaniens doivent rejeter un nouveau projet de loi qui rendrait la peine de mort obligatoire pour le crime d’"insulte" ou de "moquerie" envers Dieu, le Coran ou le prophète Mohammed, a déclaré mardi Human Rights Watch.

 

Le 16 novembre 2017, le Conseil des ministres, réuni sous la présidence du chef de l’État, Mohamed Ould Abdel Aziz, a approuvé ce projet de loi qui éliminerait la possibilité, prévue par la loi actuelle, de substituer la peine de mort par une peine de prison, si le coupable se repent rapidement.

 

"Au lieu de décriminaliser le blasphème, comme on s’y attendrait, au regard des traités internationaux signés par la Mauritanie, les autorités se ruent dans la direction opposée, fermant toute alternative à l’exécution", a dénoncé la directrice de la division Moyen-Orient et Afrique du Nord de Human Rights Watch, Sarah Leah Whitson

 

Cette initiative du Conseil des ministres est survenue une semaine après qu’une cour d’appel a condamné Mohamed Cheikh Ould Mkhaitir, un blogueur reconnu coupable d’apostasie, à une peine de prison. La cour d’appel a accepté son repentir et s’est fondée sur cet élément pour éviter la peine de mort à laquelle un premier tribunal l’avait condamné pour avoir mis en ligne un article dénonçant l’usage de la religion pour justifier les discriminations en Mauritanie.

 

L’affaire a attiré l’attention à l’échelle internationale, des personnalités islamistes et des partis politiques importants ayant appelé à son exécution.

 

Le code pénal mauritanien actuel, dans son article 306, prévoit la peine de mort pour blasphème, mais permet d’infliger une peine plus légère si l’accusé se repent.

 

Si l’Assemblée nationale adopte cette loi, la peine de mort deviendra obligatoire, sans possibilité de réduire la sanction, pour tout musulman qui raillerait ou insulterait Dieu, le Coran, Mohammed, les anges ou les prophètes.

 

La loi permettrait tout de même aux individus qui renonceraient à la foi islamique ou prétendraient avoir la foi, tout en ne croyant pas en secret, d’échapper à la peine de mort, si le coupable se repentait dans des conditions spécifiques.

 

Le moment choisi pour introduire ce projet de loi est clairement lié au verdict émis par la cour d’appel à l’encontre du blogueur, a estimé Human Rights Watch.

 

Un tribunal de première instance avait condamné à mort Mkhaitir pour apostasie, en raison de son article, dans lequel, il critiquait ses concitoyens mauritaniens qui citent des anecdotes de la vie du prophète Mohammed afin de légitimer la discrimination de caste en Mauritanie. Mkhaitir fait partie de la caste des "forgerons", considérée comme inférieure. Dans un premier temps, une cour d’appel avait confirmé sa condamnation à mort.

 

Mais le 31 janvier 2017, la Cour suprême avait décidé que l’affaire serait rejugée. Le 8 novembre 2017, la Cour d’appel de Nouadhibou a réduit la peine de Mkhaitir à deux ans de prison et à une amende. Le parquet général a aussitôt introduit un recours en cassation devant la Cour suprême.

 

La réduction de la peine aurait dû aboutir à la libération de Mkhaitir, puisqu’il avait été placé en détention préventive pendant près de quatre ans. Cependant, dans les jours suivant le jugement, l’une des avocates de la défense, Fatimata M’Baye, n’est pas parvenue à localiser son client. Un conseiller du président aurait déclaré que Mkhaitir n’avait pas été libéré et qu’il resterait en détention jusqu’à ce que la Cour suprême examine la nouvelle requête. On ne sait pas où il se trouve actuellement.

 

Le projet de loi mauritanien sur le blasphème et l'apostasie, ainsi que l’incapacité des autorités à libérer immédiatement Mkhaitir et à déclarer nulles les accusations contre lui, violent les garanties du droit international qui protègent la liberté d’expression, comme celles qui sont inscrites dans le Pacte international relatif aux droits civils et politiques (PIDCP), dont la Mauritanie est partie depuis 2004.

 

Dans son observation générale n°34, le Comité des droits de l’homme des Nations unies – l’organe d’experts indépendants qui surveille la façon dont les gouvernements appliquent le PIDCP – énonce clairement que les "interdictions des manifestations de manque de respect à l’égard d’une religion ou d’un autre système de croyance, y compris les lois sur le blasphème, sont incompatibles avec le Pacte", à moins qu’elles ne constituent une incitation à la discrimination, l’hostilité ou la violence.

 

Les normes internationales des Nations unies et d’organismes africains relatives aux droits humains, notamment au droit à la vie, encouragent les États à progresser vers l’abolition de la peine de mort. Dans le cas de pays qui la maintiennent, ces normes exigent clairement que la peine de mort soit limitée aux crimes les plus graves et prononcée uniquement à l’issue d’un procès équitable.

 

Ainsi, la Commission africaine des droits de l’homme et des peuples affirme  qu'"il est essentiel que, dans les États n’ayant pas encore aboli la peine de mort, celle-ci ne soit utilisée que pour les crimes les plus graves (compris comme étant ceux qui sont commis dans l’intention de tuer)."

 

"Au lieu d’adopter des lois pour durcir la sanction pour apostasie, la Mauritanie devrait clarifier le statut judiciaire et le lieu où se trouve Mohamed Cheikh Ould Mkhaitir, qui n’aurait pas dû passer un seul jour en prison pour ses écrits", a conclu Sarah Leah Whitson.

 

 

FIN/INFOSPLUSGABON/IOP/GABON 2017

 

 

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